C’est avec grand plaisir que nous accueillons Laurent Murier, Directeur de SOLUFONDS, une direction de fonds de droit suisse qui gère environ CHF 1.0 milliard d’actifs immobiliers. Il partagera avec Immodating sa vision sur la gérance de demain.

Photos: Sébastien Dubouchet.

Rappel des faits:

En quoi SOLUFONDS se distingue-t-il d’une direction de fonds immobilier classique?

La spécialité de SOLUFONDS consiste à faire du « White Labeling » pour fonds mobiliers et immobiliers.

Concrètement, si vous êtes intéressé à mettre en place un fonds, SOLUFONDS vous proposera une architecture ouverte dans laquelle nous gérerons tout l’administratif (comptabilité, rapport annuel et/ou semestriel, respect politique de placement, système de contrôle interne et compliance) ce qui vous permet de vous concentrer sur votre cœur de métier relatif à la gestion d’actifs (décisions de placement).

Pour prendre l’exemple du fonds Procimmo Swiss Commercial Fund 56, Procimmo SA, que vous aviez interviewé et qui est le gestionnaire du fonds, il établit la stratégie immobilière, décide dans quoi investir, et gère les actifs – et nous faisons l’administration comptable, réalisons le reporting à la FINMA, gérons les systèmes informatiques, et faisons tout l’administratif (voir la Figure 1).

L’approche traditionnelle est par exemple celle de La Foncièrepuisque vous les aviez également rencontré – et elle consiste à réaliser dans une même structure la gestion des actifs et la partie administrative et comptable. Nous proposons un modèle différent dans lequel certaines activités sont déléguées.

Schema Organisation Fonds de Placement

Figure 1: Schéma des responsabilités entre SOLUFONDS (bleu et turquoise) et les Gestionnaires (violet)

Avec quelles gérances travaillez-vous et comment collaborez-vous?

Nos 4 gestionnaires travaillent avec 17 gérances – les principales en l’occurrence (voir table ci-dessous pour la liste). Outre le fait que les gérances doivent être proches des immeubles gérés et connaître le marché local, elles ont aussi un rôle très important pour nos gestionnaires : elles les alimentent en immeubles à acheter.

Les gérances doivent être proches des immeubles gérés et connaître le marché local.

Du côté de SOLUFONDS, nous récoltons l’information financière de ces gérances (comptabilité des immeubles) et la consolidons pour l’insérer dans un système comptable aux normes LPCC (loi sur placement collectifs de capitaux) afin d’établir la comptabilité, ainsi que le rapport annuel et/ou semestriel.

On entend dire que certaines gérances se font exclure de fonds immobiliers, qu’en est-il?

Nos gestionnaires se sont effectivement séparés de certaines gérances. Ce métier est concurrentiel et le reporting demandé est très important.

Nous ne pouvons pas nous permettre de travailler avec une gérance qui ne répond pas à nos attentes en terme de délais, coûts, capacité de livrer des données de manière automatisées ou de suivi des locataires.

Dernièrement les raisons de la rupture d’un contrat étaient dues au fait que la gérance ne voulait ou ne pouvait pas remplir le cahier des charges que nous leur avons fournis soit au niveau de nos exigences (comme par exemple des clôtures trimestrielles) soit par rapport au développement informatique mis en place afin de recevoir les données par transfert au travers d’une interface.

Cette transmission d’information entre les gérances et les fonds immobiliers a l’air d’un détail mais elle est critique d’un point de vue réglementaire. A une époque nous recevions les informations au format papier et les données devaient être saisies manuellement – ce qui prenait un temps considérable et prêtait facilement à l’erreur.

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Depuis quelques années, l’efficience a été améliorée avec l’informatique mais le modèle d’interface utilisé exigeait que les gérances fournissent les données comptables à fréquence fixe dans un format fixe, propre au système informatique du client de la gérance. Dans ce cadre, des développements informatiques importants étaient requis – parfois plus d’une centaine de milliers de francs. Les gérances n’étaient par conséquent pas toutes d’accord de prendre en charge ces coûts sans engagement des institutionnels sur la durée.

Plus récemment, le processus a cependant été fort simplifié pour les gérances travaillant avec SOLUFONDS au travers d’un partenariat avec Crossing-Tech SA. Que cela soit au format Acrobat, Excel, CSV, ou Word, Crossing-Tech accepte les données des gérances et les traite ensuite avant que nous les reprenions pour les injecter dans notre comptabilité. Dans ce cas, le développement informatique et les coûts y relatifs sont nettement moindre pour les gérances – peut-être 10 jours hommes selon le cas – et pour SOLUFONDS le coût reste mesuré également.

Bien sûr, la gérance qui même dans ce cadre décide de ne pas nous livrer les informations aura un désavantage qui pourrait nous conduire à nous séparer d’elle.

Que pensez-vous de l’innovation d’Immodating, le dossier de location électronique et les listes de candidats pour gérances?

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Je pense le plus grand bien du dossier électronique qu’Immodating propose. Il s’agit d’une simplification des processus qui ne peuvent qu’être profitable aux gérances. L’outil évite certainement un traitement manuel considérable par les gérances – surtout si après elles peuvent importer les dossiers acceptés dans leurs propres systèmes ce qui semble être le cas (ndlr : rédaction du bail, archivage, etc.).

L’outil d’Immodating évite certainement un traitement manuel considérable par les gérances.

Par ailleurs je pense que les locataires ne sont pas assez considérés et qu’un tel logiciel est positif pour simplifier leur vie et va permettre de bâtir une relation à long terme – dans cinq ans, les choses seront peut-être moins faciles pour les bailleurs qu’elles ne le sont actuellement.

Enfin, ce genre d’outil permet aux gérances une plus grande diligence dans le traitement des dossiers qu’elles peuvent analyser proprement et facilite le choix de locataires solides – ce qui est important pour limiter nos pertes sur loyer.

D’une manière général, l’innovation d’Immodating va dans le sens de l’automatisation : réduire les saisies et passer davantage de temps sur des choses essentielles est ce que nous encourageons.

Comment sera la gérance de demain et quelle sera son organisation idéale?

Les interactions entre fonds et gérances restent encore très manuelles. Je pense qu’un gros travail d’automatisation doit encore être fait – que cela soit au niveau des clients institutionnels, au sein des gérances, ou encore dans la relation avec les locataires avec l’innovation d’Immodating.

Des tonnes de paperasse pourraient encore être évitées.

Automatiser devient de plus en plus important car les fonds vont demander des informations de plus en plus précises et ce à une fréquence de plus en plus élevée, ce qui requiert une informatique performante.

Dans un autre domaine, la gérance de demain est celle qui aura fait auditer ses propres processus (au travers de certification qualité et autres). Actuellement le gestionnaire du fonds s’occupe des contrôles sur toute l’activité de la gérance – depuis ses décomptes jusqu’à son travail avec les locataires ou au technique en passant par les aspects financiers. Nous devons également opérer certains contrôles, que les gestionnaires ont déjà faits. Ces processus sont très lourds. Des audits et certifications de qualité côté gérance devraient permettre d’éviter une partie du travail de contrôle. Si on ne pouvait vérifier qu’une seule fois au lieu de deux déjà le gain serait considérable.

Le mouvement de certification et audit a commencé auprès des gérances, et continuera je l’espère.

Pensez-vous que les plus grandes gérances travaillent mieux que les petites, ou plutôt l’inverse?

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Selon moi la taille n’est pas le facteur clef dans la qualité des services que nous recevons des gérances – la distinction se fait plutôt au niveau des personnes.

L’image d’une gérance plus petite plus personnalisée par rapport à une grande gérance mieux organisée ne tient pas toujours – tout dépend de la qualité et de la personnalité des collaborateurs au sein de ces organisations. Une formation des collaborateurs des gérances par rapport aux activités des fonds immobiliers est également une piste (par exemple Immocapital de l’USPI).

On pourrait cependant imaginer qu’une distinction s’établisse à l’avenir à cause des montants requis pour les développements informatiques que demandent les institutionnels.

On verrait alors les grandes gérances travailler davantage pour les institutionnels et les plus petites se concentrer sur la clientèle privée. Comme mentionné, SOLUFONDS essaie toutefois de limiter le coût de ces systèmes afin de garder une structure ouverte à toutes les gérances. Au delà des technologies, nous opérons dans les services et l’humain reste fondamental.

A titre personnel, qu’est-ce qui vous donne le plus de satisfaction et qui au contraire tend à vous irriter?

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Ma plus grande satisfaction provient de l’étendue du métier que je pratique, il s’agit d’un domaine très vaste faisant appel à des aspects financiers, immobiliers, comptable, juridique et humains bien sûr. Quant à ce qui m’irrite, il s’agit de personnes qui se croient plus importantes que les autres et qui ne respectent pas les gens. Dans notre métier, il faut se rappeler que les revenus immobiliers proviennent d’un partenariat : le locataire n’est pas une vache à lait mais une personne avec qui une collaboration à long terme est importante et nécessaire. De mon expérience, quand le respect de chacun est présent, les choses se passent toujours bien.

Merci à Laurent Murier et à SOLUFONDS pour cet entretien avec Immodating. Votre gérance répond-elle adéquatement aux exigences des fonds? Que pensez-vous de ces évolutions informatiques dans l’immobilier? Si vous avez aimé cet article, n’hésitez pas à le partager.

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